En lisant le titre de l’article, vous vous attendiez peut-être à ce que je parle de la confiance en soi de l’enfant.
Pourquoi vous parler de la confiance en soi du parent et non de celle de l’enfant ? Tout simplement, car je suis convaincue que pour permettre à nos enfants d’acquérir cette confiance, il est essentiel de leur « montrer l’exemple » et que leurs parents se sentent en confiance dans leur rôle.
Le Dr C. Gueguen a écrit que « la confiance en soi, dans la vie, ne se décide pas, elle nous est donnée par les autres, d’abord par les parents, puis par l’entourage ». Mais comment transmettre à notre enfant cette confiance en soi, si nous-même ne la ressentons pas ?
J’ai l’intime conviction qu’il est de plus en plus difficile de se faire confiance lorsque l’on est parent. Au contact des parents que j’accompagne, j’observe souvent cette difficulté, ce sentiment de ne pas être à la hauteur, de ne pas « en faire suffisamment », de ne pas être un « bon parent », et d’avoir la réponse mais de ne pas se faire suffisamment confiance pour l’écouter.
Pourquoi est-ce si difficile d’avoir confiance en soi ?
Je crois que ce manque de confiance peut tout d’abord venir des critiques, des phrases « assassines » que vous pouvez entendre en tant que parent. « Tu l’allaites encore à son âge ? » « Quoi ? Tu ne vas pas l’allaiter ? Alors que c’est ce qu’il y a de mieux pour lui ? Mais tu es une mauvaise mère ! » « T’en as pas marre de le porter tout le temps ? Il va devenir complètement dépendant à toi ! » « Tu pars en week-end sans lui ? Mais quand on fait un enfant on l’assume, et on ne le laisse pas pour se détendre tranquille en week-end pendant que les grands-parents le gardent ! »
Des phrases qui paraissent anodines pour celui qui les exprime, mais qui en réalité ne font que renforcer le manque de confiance du parent qui la reçoit.
Quoi que vous fassiez, quoi que vous disiez, il y a toujours quelqu’un qui n’est pas d’accord avec vos choix, avec votre éducation. Et, certaines fois, ce désaccord peut être exprimé de manière violente et blessante.
Lorsque vous devenez parent, vous expérimentez, vous tâtonnez, vous cherchez, vous vous trompez parfois, vous faites des erreurs et c’est tout à fait ok, c’est même important, car c’est en faisant des erreurs que vous avancez. “On ne naît pas parent, on le devient”.
Mais, comment avoir confiance en ce rôle de « parent en devenir », que l’on ne quitte jamais finalement, quand l’on entend des phrases blessantes, quand l’on se sent dévalorisé ?
Et quand l’on a l’impression que la voisine est tellement plus forte que nous ? Qu’elle gère ses enfants, sa maison, et que « moi, à côté, je ne vaux rien ». Nous sommes tellement tentés de nous comparer, de regarder ce que fait l’autre, et de se sentir « inférieur », « mauvais », à côté de lui, à côté de ces parents qui ont l’air si parfaits.
Je crois que les réseaux sociaux ont aussi une part de responsabilité dans ce sentiment de comparaison et d’ « infériorité » que les parents peuvent parfois ressentir. Vous pouvez avoir le sentiment que les mamans que vous observez sur les réseaux sociaux ont tellement plus de facilité avec leurs enfants, leur proposent toujours « des trucs super chouettes », et que vous, à côté, vous n’êtes pas un si bon parent que ça.
Ce que vous ne savez pas, c’est que derrière une photo sur les réseaux, derrière l’image d’un autre parent, il peut y avoir une souffrance, une difficulté, que vous ne percevez pas. Et ce parent là peut lui même vous observer et vous trouver « meilleur » que lui dans son rôle de parent.
En tant que parent, vous ressentez aussi très certainement l’envie de « bien faire ».
Depuis plusieurs années, nous avons la chance d’avoir accès à de nouvelles découvertes fabuleuses en ce qui concerne le développement de l’enfant, notamment grâce aux apports des neurosciences, et d’autres concepts très intéressants, qui remettent les besoins et le bien-être de l’enfant au centre de l’attention. Si vous vous intéressez à ces découvertes, vous avez certainement envie de « bien faire », d’accompagner les émotions de votre enfant, de respecter son développement, de lui apporter la sécurité affective dont il a besoin. Mais parfois, vous pouvez avoir le sentiment d’être « perdu » au milieu de tous ces apports : « cododo ou pas cododo ? portage ou pas ? allaitement ou pas ? », et le fait de choisir l’un ou l’autre peut alors entraîner une certaine culpabilité.
Lorsque les journées sont difficiles, lorsque vous êtes fatigué, en colère, triste, vous pouvez alors ressentir la culpabilité de ne pas apporter ce qu’il « y a de meilleur » à votre enfant, de ne pas être à la hauteur, et de ne pas respecter les valeurs que vous vous étiez fixés.
Devenir parent, c’est aussi se retrouver face à sa propre enfance, sa relation avec ses propres parents, son vécu, et son histoire.
Et comment avoir confiance en nous si nos parents, notre entourage lorsque nous étions enfants, ne nous ont pas transmis ce sentiment ? Nous ne pouvons pas leur reprocher, ils ont fait avec les moyens et les connaissances qu’ils avaient à l’époque, et leur propre histoire.
Mais, les mots que nous avons entendus lorsque nous étions enfants restent en nous, il est parfois très difficile de les effacer, et lorsque vous devenez parent, lorsque que vous êtes face à vos doutes et au sentiment d’être incapable, ces mots peuvent très vite remonter à la surface.
Quelques idées pour renforcer votre confiance en vous :
Laisser de côté les critiques :
Je sais combien il peut être difficile de ne pas tenir cas de certaines paroles, surtout quand elles sont exprimées par des personnes à qui l’on tient, par des amis, par de la famille. Mais, je suis convaincue qu’il est important de s’en libérer, de ne pas en faire cas pour pouvoir vous épanouir dans votre parentalité. Quoi que vous fassiez, quoi que vous choisissiez, il y aura toujours une personne qui sera en désaccord et qui critiquera votre façon de faire.
De plus, vous avez entièrement le droit de ne pas être en accord avec l’opinion de certaines personnes, et de ne prendre que les avis qui vous intéressent et qui vous semblent le mieux convenir à votre enfant. Il existe des tas d’idées, de concepts, d’avis de spécialistes, et vous pouvez piocher celles qui vous intéressent. Il peut aussi vous arriver de trouver une idée très intéressante, mais qu’elle ne fonctionne pas avec votre enfant.
Vous « inspirer » plutôt que « vous comparer » :
Plutôt que de vous comparer lorsque vous voyez un parent qui vous semble « meilleur » dans la vie de tous les jours ou sur les réseaux sociaux, je vous propose de vous « inspirer ». Vous voyez un parent qui propose une activité très sympa à son enfant, ou une façon d’accompagner ses émotions qui vous rend admiratif ? Alors, servez vous en pour vous inspirer, et vous élever. Ce que vous proposerez à votre enfant ne sera pas identique, mais ce ne sera ni moins bien, ni meilleur, ce sera simplement différent, car cela viendra de vous-même. Et la prochaine fois, ce sera ce même parent qui s’inspira de vous pour tout autre chose !
Lâcher prise :
Lâcher prise, c’est accepter qu’il est normal de faire des erreurs et qu’il n’existe aucun parent parfait. D’ailleurs, la perfection, ça n’existe pas, alors les parents parfaits, non plus.
Vous êtes simplement le parent parfait pour votre enfant. Un parent est avant tout un être humain, avec ses émotions, sa personnalité, son histoire, ses forces, et ses faiblesses. Qui est la personne la mieux placée pour soin de votre enfant ? Vous-même. Vous, qui faites de votre mieux, avec vos capacités, et surtout, vous, qui avez le droit à l’erreur. Être un parent « compétent », c’est avant tout aimer son enfant, veiller à son bien-être, et répondre à ses besoins physiologiques et ses besoins de sécurité et d’affection. Vous êtes la personne qui connaît le mieux votre enfant. Vous connaissez votre enfant, ses besoins, ses réactions, sa personnalité. Cette connaissance vous permet de trouver la meilleure solution pour lui, et c’est vous qui prenez les décisions.
Comme le dit C. Chadelet dans son livre Le mois d’or, « au milieu des tâtonnements, des tentatives, des doutes, des inquiétudes, des imperfections, rappelez-vous que vous détenez toutes les ressources nécessaires pour être le parent de ce petit ! Vous êtes compétente pour le job ! Le petit être que vous tenez dans vos bras n’a aucune idée lui non plus de toutes les compétences qu’il va acquérir, de son potentiel en devenir et pourtant, il a en lui tous les potentiels pour s’adapter à tous les climats, tous les lieux de naissance. De même, en chaque nouveau parent résident déjà les capacités de répondre aux besoins de son enfant. La confiance en soi est importante pour bien vivre la parentalité. Ce n’est pas d’une confiance arrogante dont il est question mais d’une confiance en votre équipe, vous, votre bébé, mais aussi en votre conjoint, une confiance en évolution permanente. Ayez confiance dans le potentiel de cette famille que vous formez désormais, à être unie, harmonieuse et rayonnante. Croire en ce noyau, le laisser se construire petit à petit, l’aimer, reconnaître sa beauté et sa valeur, de cette confiance naîtront la force, l’intuition et l’harmonie. »
Passer du temps avec votre enfant :
C’est en passant du temps avec votre enfant que vous apprendrez à le connaître. C’est aussi en profitant de chaque instant, en étant présent, physiquement ou psychiquement, que vous développerez ce lien unique, et partagerez des moments de joie, de complicité, qui vous donneront de la force et renforceront votre confiance.
Toutefois, comme tout être humain, vous ne pouvez pas être véritablement présent, 24h sur 24. Vingt minutes de « qualité » seront plus efficaces que deux heures de fatigue, de conflits et où vous n’arrivez pas être disponible.
Vous pouvez retrouver ici des outils pour enrichir le lien d’attachement avec votre enfant.
Relativiser :
Pour lâcher prise, il est aussi important de relativiser : « Est ce vraiment grave si… ? »
Vous pouvez aussi pour cela établir vos priorités et ainsi ne pas culpabiliser si vous ne faites pas certaines choses : « Qu’est ce qui est prioritaire ? Faire le ménage ou passer du temps avec mon enfant ? » « Et si je me sens fatigué(e), n’est il pas important de me reposer et demander à une personne de confiance de s’occuper de mon enfant, pour être vraiment présent(e) et disponible pour lui ensuite ? »
Respirer :
Pris par le quotidien et toutes les contraintes de celui-ci, nous avons parfois tendance à ne pas nous poser et à « ne pas souffler ». Or, souffler, respirer, est essentiel.
Lorsque vous vous sentez en difficulté, lorsque la culpabilité devient très forte, ou lorsque vous êtes pris de stress, ou de l’impression de ne pas y arriver : Respirez.
Arrêtez vous deux minutes, inspirez-expirer, concentrez vous sur toutes les sensations dans votre corps. Le fait de vous concentrer sur votre respiration vous permettra de vous décentrer de vos préoccupations, et de prendre du recul sur celle-ci, pour mieux rebondir ensuite.
Je vous invite aussi à découvrir la méditation qui est un merveilleux outil pour vous permettre de lâcher prise, de vous libérer de vos peurs, des jugements négatifs envers vous-même, de vos difficultés.
Prendre du temps pour vous :
En tant que parent, vous pouvez parfois être pris dans une course folle, entre votre travail, l’organisation logistique, la gestion de la maison, des tâches ménagères, et votre rôle de parent. Alors que les heures et les journées s’enchaînent, que vous ne prenez pas une minute de plaisir pour vous, il est évident qu’il est très difficile de relativiser, de lâcher prise face à certaines situations où l’on se sent épuisé, impuissant, énervé, en colère, incapable face à son enfant.
Je crois qu’il est essentiel de s’autoriser des moments dans la journée rien que pour soi, pour quelque chose qui nous fait du bien : lire quelques passages d’un livre, regarder un épisode à la télé, une vidéo qui nous fait rire, appeler un(e) ami(e), aller se balader, faire du sport, manger du chocolat, prendre un bain, méditer, faire une séance de yoga. La liste est longue et je suis sûre que de nombreuses idées vous viennent, alors n’attendez plus, à partir de demain, prévoyez au moins un moment dans la journée, rien que pour vous.
Observer le positif :
Nous avons souvent tendance à relever le négatif, à nous blâmer lorsque nous pensons avoir fait une erreur, à n’observer que les événements négatifs. Mais combien de moments positifs, de moments de petits bonheurs vivons-nous au court d’une journée ? Des tas !
Il suffit juste de savoir les déceler. Cette observation peut parfois être difficile lorsque nous sommes pris dans le rythme des journées effrénées. Mais le soir, au moment de vous coucher, n’hésitez pas à faire une liste de vos « petits bonheurs » de la journée, de ces moments qui vous ont fait du bien, seul(e), en couple, entre amis, avec vos enfants. Et n’hésitez pas à lister les moments qui vous ont rendu fier de vous.
En effet, vous avez le droit d’être fier de vous, et de vous faire des compliments. Je dirais même que c’est indispensable ! Si vous avez du mal à trouver des raisons d’être fier de vous, appuyez vous sur un compliment que quelqu’un vous a fait, sur une expérience qui a marché avec votre enfant, et félicitez-vous.
Cela sera peut-être difficile à faire au début, mais petit à petit, vous y prendrez goût et l’exercice deviendra plus facile.
Vous pouvez aussi vous réciter dans votre tête ou à voix haute des affirmations positives, qui renfonceront votre confiance en vous, telles que « Je suis capable » ; « Je fais de mon mieux» ; « Je suis merveilleux(se) » ; « Je m’aime et m’accepte tel(le) que je suis » ; « J’apporte à mon enfant tout ce dont il a besoin » ; « Je remplace tout jugement négatif envers moi même par de l’amour inconditionnel ».
« Faire équipe » à deux :
Le terme « parents » se définit comme « le père, et la mère ». Devenir parents, c’est devenir « mère » et « père » (ou co-parent), à deux. Chacun est essentiel à la vie de l’enfant, et pour cela il est important d’arriver à « travailler ensemble », et cela représente un travail quotidien. En effet, chacun a ses propres représentations, son propre vécu, et ses propres envies d’éducation. Elever un enfant peut alors s’avérer difficile et source de tensions. Toutefois, l’enfant est capable de s’adapter et faire la différence entre l’attitude de son père et de sa mère.
Si vous acceptez la façon de faire de votre partenaire, celui-ci ressentira votre regard attentif et bienveillant, et cela renforcera sa jauge de confiance en soi. De la même façon, si vous sentez que votre conjoint(e) a confiance en vous, en votre rôle de parent, et qu’il approuve votre façon de faire, votre confiance en vous et en vos compétences parentale augmentera.
Cela favorisera aussi la communication entre vous et votre enfant en ressentira alors les bénéfices.
Ce sentiment de « confiance en l’autre » passe aussi par des mots bienveillants et valorisants. Vous pouvez par exemple exprimer à votre conjoint(e) que vous l’aimez, que vous appréciez sa façon d’être parent. Vous pouvez aussi être attentif à ne pas trop le/la critiquer, à ne pas l’écarter, et à l’épauler.
Votre conjoint(e) est aussi un véritable allié car il est la personne la plus proche de vous au quotidien, et donc la personne sur qui vous pouvez vous appuyez pour exprimer vos peurs, vos craintes, vos doutes et toutes vos émotions.
Oser en parler :
En effet, exprimer vos ressentis, auprès de personnes bienveillantes qui ne vous jugeront pas, vous permettra de vous en libérer, de vous sentir écouté, et de trouver en vous les réponses.
Pour cela, vous pouvez vous adresser à des proches en qui vous avez confiance, mais aussi à des professionnels bienveillants, expérimentés avec les enfants.
En vous appuyant sur des personnes qui vous veulent du bien, qui ne vous jugent mais essaient de vous aider à trouver la meilleure solution pour vous et votre enfant, vous serez plus à l’aise avec celle-ci, et vous sentirez davantage en confiance. Toutefois, vous avez aussi le droit de ne pas être d’accord, et de l’exprimer.
Vous pouvez aussi échanger avec d’autres parents. En partageant vos expériences, vous réaliserez peut-être que tous les parents rencontrent des difficultés, et cela vous permettra de vous rassurer, et de prendre du recul sur votre situation.
Les groupes d’échanges entre parents que je propose, mais aussi ceux proposés par les CAF, les PMI, les lieux d’accueil enfants-parents et de nombreux autres lieux sont de véritables lieux ressources qui vous permettront d’échanger avec d’autres parents.
Conclusion
Références
GUEGUEN G., Pour une enfance heureuse, Editions Robert Laffont, Paris, 2014
CHADELAT C., MAHE-POULIN M., Le mois d’or, Presses du châtelet, 2019
DUCLOS G., L’estime de soi des parents, Éditions du CHU Sainte-Justine, 2009, 72 p.